Découverte des décors peints d'une belle demeure patricienne du 16e siècle à Corcelles

01.05.2025

​À Corcelles, des travaux de transformation à la Grand'Rue 31 ont révélé des trésors cachés. Ce bâtiment mis sous protection depuis longtemps en regard de son exceptionnelle façade Renaissance, abrite des plafonds moulurés et des décors peints qui en ornaient les intérieurs aux 16e et 17e siècles.

Le bâtiment formé des actuels n° 31 et 32 de la Grand'Rue de Corcelles constitue un exceptionnel ensemble de style Renaissance dont la construction intervient en deux étapes dans la seconde moitié du 16e siècle. Cet édifice a été bâti par les descendant-e-s de Jean Barillier (+1553), membre d'une famille patricienne reconnue, éteinte au début du 18e siècle.

Les analyses menées par l'Office cantonal du patrimoine bâti et immatériel (OCPI) avec la collaboration de l'Office de l'archéologie cantonale (OARC) indiquent qu'il s'agit d'une gentilhommière cossue formée d'une maison de maître bâtie en 1565, entre une cour au portail monumental et un grand bâtiment rural. Quelques années après, vers 1600, la maison est étendue au-dessus de la cour donnant à l'ensemble son imposante façade actuelle du côté de la rue. Le volume des constructions, leur richesse décorative et la qualité des façades signalent une réalisation ambitieuse et ostentatoire, qui n'est pas sans rappeler les châteaux viticoles contemporains. Malgré le presque demi-millénaire écoulé, la totalité des façades, de la charpente et des plafonds ainsi qu'une partie significative des aménagements intérieurs du 16e siècle ont été jusqu'ici préservés.

Des splendeurs cachées
Sous son imposante toiture de 1586, le bâtiment principal est formé de deux étages d'habitation aux plafonds particulièrement élevés et ornés de solives moulurées, surmontant une vaste cave vigneronne. Cette dernière, une des plus remarquables de la région pour cette époque, est formée d'un cellier à deux travées de trois voûtes d'arrêtes soutenues par des colonnes à chapiteau – un aménagement pittoresque à l'origine d'une légende tenace, qui voulait y reconnaître une chapelle dépendant du prieuré voisin –, associé à un grand pressoir et à son étonnante cuve en granit du 16e siècle.

Le premier étage, ou bel étage, accueillait en particulier les pièces de séjour et d'apparat, le Grand Poêle et le Petit Poêle, qui se distinguent en façade par le développement de leurs fenêtres et, à l'intérieur, par la qualité de leurs aménagements. Sous les boiseries du 18e siècle du Grand Poêle, ont été trouvés les vestiges bien conservés de plusieurs décors peints, en particulier un motif d'appareil feint de couleur ocre-jaune habillant les embrasures au 16e siècle et un décor polychrome de guirlandes florales ornant les murs vers 1700. Plus tard, vers 1770, ces décors ont été masqués par des boiseries accompagnant l'installation d'un élégant poêle à catelles peut-être attribuable au poêlier-décorateur Rodolphe Landolt (1742-1821). Le poêle était alimenté par l'imposante cheminée de la grande cuisine adjacente dont le manteau Renaissance en forme d'entablement à corniche est caractéristique des belles demeures régionales de la fin du 16e siècle et du début du 17e siècle. Les mêmes décors de faux-appareil ocre-jaune ornaient toutes les embrasures du bâtiment, ce dont témoignent de manière éclatante ceux qui ont été intégralement conservés dans l'une des chambres du deuxième étage. Parmi les nombreux graffitis du 17e siècle gravés dans l'enduit peint qui restent à déchiffrer, on trouve des dates, des initiales, d'intrigantes rosettes géométriques ou plus prosaïquement, selon l'interprétation de l'Office des archives de l'État (OAEN), les comptes d'un·e marchand·e de draps.