Un contre-projet à l’initiative « Pour une Cour des comptes »

17.01.2020

Le Conseil d'État ouvre une période de consultation sur un projet de rapport à l'attention du Grand Conseil en réponse à l'initiative intitulée « Pour la création d'une Cour des comptes ». En proposant d'instaurer un niveau supplémentaire de contrôle des activités publiques, l'initiative risque d'alourdir et d'affaiblir plutôt que de renforcer les mécanismes existants de contrôle sur l'activité publique. Partageant néanmoins certaines aspirations portées par les initiant-e-s, le Conseil d'État propose un contre-projet en renforçant la loi sur les subventions et la loi sur le contrôle des finances.

Déposée en octobre 2017, l'initiative « Pour une Cour des comptes » vise à contrôler l'activité de l'administration cantonale, des communes, des entités de droit public et des organismes privés subventionnés ainsi qu'à évaluer les politiques publiques par la création d'une nouvelle structure de contrôle indépendante. À ce jour, seuls deux cantons en Suisse, Vaud et Genève, disposent d'une institution de ce type.

Bien que le gouvernement neuchâtelois partage certaines des aspirations portées par les initiant-e-s quant à la transparence et au contrôle de l'activité publique, il appelle à une solution plus adaptée que celle proposée par l'initiative. Après analyse, il constate que, telle qu'envisagée par l'initiative, la création d'une Cour des comptes serait problématique pour plusieurs raisons notamment un ancrage constitutionnel flou, des risques d'instrumentalisation des contrôles à des fins politiques, des activités redondantes avec celles d'autres organes existants, ou encore des coûts élevés de mise en œuvre et de fonctionnement. Cela conduirait également à un affaiblissement regrettable du rôle de contrôle du Parlement et de ses commissions et du Contrôle cantonal des finances, dont l'activité est reconnue comme donnant pleine et entière satisfaction.

Une solution plus adaptée à travers un contre-projet

Dans le but, partagé avec les initiant-e-s, de garantir une transparence irréprochable et un contrôle efficace et indépendant des entités publiques et des institutions subventionnées, le Conseil d'État propose une solution alternative à travers deux modifications législatives.

La première consiste à réviser la loi sur les subventions afin d'assurer une meilleure transparence tout en prolongeant et en ancrant au plan législatif les démarches entreprises depuis 2015 dans le cadre des réformes de l'État. Il s'agira principalement de généraliser l'utilisation des contrats de prestations pour régler les relations entre l'État et les partenaires qu'il subventionne. Le principe de couverture de déficit sera aussi abandonné. Cette révision prévoit également de renforcer le contrôle des subventions en imposant un audit périodique de l'utilisation des fonds et enfin, de publier chaque année la liste des subventions significatives et répétitives versées par l'État pour plus de transparence.

Le second volet du contre-projet porte sur la loi sur le contrôle des finances et vise à renforcer encore davantage l'autonomie et l'indépendance du contrôle cantonal des finances (CCFI). Concrètement, cela se traduit par la création d'un comité d'audit chargé d'assurer des relations exemptes de toute influence entre les autorités politiques et le CCFI, par l'extension du rôle de surveillance de ce dernier sur les entités subventionnées ainsi que par la publication obligatoire de son rapport annuel d'activité et d'indications statistiques sur la façon dont ses remarques et recommandations sont prises en considération.

Le Conseil d'État est ainsi convaincu que les préoccupations légitimes des initiant-e-s au sujet de la transparence et du contrôle des activités publiques trouveront des réponses plus satisfaisantes, moins problématiques et moins onéreuses qu'avec le texte de l'initiative. Concrets et cohérents, ces progrès auront également le mérite de tenir compte de l'important travail réalisé depuis plusieurs années par la collectivité publique et ses partenaires en matière de gestion et de transparence. Le gouvernement préconise dès lors le retrait de l'initiative et, à défaut, en propose le rejet au profit de ces propositions.

Avant sa transmission au Grand Conseil, le contre-projet est mis en consultation dès la semaine prochaine et jusqu'au 6 mars auprès des milieux intéressés.