Introduction d'un salaire minimum dans le canton de Neuchâtel

Une première suisse, deux ans après le vote du peuple

11.11.2013

Le 27 novembre 2011, une majorité de la population neuchâteloise acceptait d'introduire le principe d'un salaire minimum dans la Constitution cantonale. Initiée par le Conseil d'Etat, une commission extra-parlementaire composée des syndicats, des milieux économiques et de représentants des partis politiques, a travaillé à la recherche de solutions qui respectent le cadre légal fédéral et la volonté populaire. Fort des avis exprimés au sein de la commission et des analyses effectuées par les services de l'Etat, le Conseil d'Etat vient d'adopter un rapport à l'attention du Grand Conseil sur ce sujet. Conscient de la faible marge de manœuvre que lui impose le droit fédéral, de la nécessité d'agir en matière de politique sociale et de l'importance du maintien d'une compétitivité du tissu industriel cantonal, le Conseil d'Etat propose une solution la plus à même de répondre aux différentes contraintes qui lui sont posées, à savoir l'inscription d'un salaire minimum de 20 francs par heure dans une base légale cantonale. Le projet de loi prévoit une entrée en vigueur au 1er janvier 2015 avec une possibilité pour le Conseil d'Etat de prolonger le délai d'un an en fonction de situation exceptionnelle.
Un dossier d'actualité

Alors que les cantons du Valais et du Tessin devraient se prononcer prochainement sur des projets de salaires minimaux cantonaux et qu'une votation populaire fédérale interviendra en 2014 sur un salaire minimum mensuel à 4.000 francs, le Conseil d'Etat neuchâtelois répond au mandat que lui a confié une majorité du peuple neuchâtelois il y a moins de deux ans. Il présente ainsi un projet de modification de la loi cantonale sur l'emploi et l'assurance-chômage (LEmpl) pour y inscrire le principe d'un salaire minimum, applicable à tous les travailleurs actifs dans le canton, hormis les personnes qui sont en formation professionnelle ou en mesure d'intégration.

Un montant fixé à 20 francs par heure

Le montant de 20 francs par heure retenu dans le projet de loi provient des analyses qui ont été faites dans le cadre des travaux de la commission extra parlementaire nommée par le Conseil d'Etat à l'été 2012. Il correspond à un salaire mensuel brut de 3.640 francs pour 42 heures de travail hebdomadaire. Il s'inscrit directement dans la ligne tracée par l'arrêt du Tribunal fédéral du 8 avril 2010, qui rappelle que le principe d'un salaire minimum cantonal n'est admissible que s'il s'inscrit dans le cadre de la politique sociale, et non de la politique économique. Cela implique de retenir un montant relativement proche des revenus minimaux résultant des systèmes d'assurance et d'assistances sociales fédéraux. Solidement fondé sur les revenus garantis par les prestations complémentaires à l'AVS/AI, le montant retenu de 20 francs de l'heure permettra à 2.700 personnes de voir leur revenu augmenter. 

Des conséquences positives pour le canton

L'introduction d'un salaire minimum de 20 francs impactera 3% des emplois et 4% des travailleurs du canton. Parmi ces travailleurs, près de deux tiers occupent un emploi à temps partiel et deux tiers sont des femmes. A l'heure où le canton compte un grand nombre de familles monoparentales et un taux d'aide sociale élevé, l'introduction d'un salaire minimum cantonal permettra notamment à de nombreuses femmes de voir leur situation s'améliorer. De plus, le canton verra les montants alloués à l'aide matérielle diminuer et ses recettes fiscales augmenter. Avec un coût annuel de 9 millions de francs pour l'économie neuchâteloise, soit 0,21% de la masse salariale cantonale, l'introduction du salaire minimum n'impactera pas significativement les branches exportatrices, puisque ces dernières pratiquent déjà une politique salariale supérieure à ce plancher.

Un rôle intact dévolu aux partenaires sociaux

Par essence, le salaire minimum cantonal constitue un plancher, sans lien avec le niveau de formation professionnelle ou d'expérience. De plus, le salaire minimum est fondé sur un minimum garanti par les assurances sociales pour une personne seule, alors qu'il est communément admis qu'un salaire à plein temps devrait permettre à l'employé de contribuer aux charges de sa famille. Enfin, le salaire minimum ne précise aucun cadre en matière de conditions de travail. Tous ces éléments essentiels doivent continuer à être négociés dans le cadre du partenariat social, au travers de conventions collectives de travail (CCT) et autres contrats types de travail (CTT), qui conservent dès lors leur pleine raison d'être. Cependant, les CCT et CTT existants qui fixeraient actuellement des minimas inférieurs à 20 francs l'heure devront être adaptés en conséquence.

Une entrée en vigueur au 1er janvier 2015

Le projet de loi prévoit une entrée en vigueur au 1er janvier 2015 avec une possibilité pour le Conseil d'Etat de prolonger le délai d'un an en fonction de situation exceptionnelle. Par ailleurs, la désignation par le Conseil d'Etat d'une commission tripartite visant à appuyer celui-ci dans la mise en œuvre du salaire minimum cantonal est prévue pour une durée de huit ans au chapitre des dispositions transitoires. Finalement, le projet de loi prévoit que le montant du salaire minimum soit adapté chaque année au renchérissement sur la base de l'indice suisse des prix à la consommation.

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