Historique

Date de la commémoration

Neuchâtel, Genève et Valais

Le 12 septembre 1814, la Diète fédérale réunie à Zurich admet la principauté de Neuchâtel dans la Confédération suisse, comme 21e canton, en même temps que les cantons du Valais (20e) et de Genève (22e).

Les actes de réunion proprement dits de ces cantons ont été signés ultérieurement, soit les 19 mai 1815 (Neuchâtel et Genève) et 4 août 1815 (Valais), la signature du Pacte fédéral du 7 août 1815 entérinant définitivement ces admissions.

Les cantons de Genève et du Valais, dans leurs traditions, mettent l’accent sur les dates de mai et août 1815. C’est la raison pour laquelle ils marqueront le bicentenaire de leur admission de manière un peu différente du canton de Neuchâtel, puisque Genève fêtera son bicentenaire du 31 décembre 2013 au 19 mai 2015 et le Valais durant toute l’année 2015.

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Source: archives de l’Etat de Neuchâtel

Acte démocratique

Dans le canton de Neuchâtel, c’est la date du 12 septembre qui a marqué les esprits de la population. Dès les années 1820, alors que dans d’autres cantons la contestation monte contre les régimes oligarchiques en place, le lien entre Neuchâtel et la Suisse devient synonyme de démocratie et d’opposition au régime royaliste en place à Neuchâtel. La date du 12 septembre est de plus en plus utilisée pour manifester le désir d’un régime politique plus libéral. Cette évolution culmine en 1831: c’est en effet dans le cadre des banquets tenus en septembre 1831 pour fêter l’admission dans la Confédération que s’organise la tentative de renversement par la force du régime royaliste, menée par Alphonse Bourquin, chef des troupes révolutionnaires qui, le 13 septembre 1831, s’emparent du château de Neuchâtel.

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Source: archives de l’Etat de Neuchâtel 

Fête des Fontaines

 Dès lors, le 12 septembre devint une date très sensible dans le calendrier neuchâtelois, sous des formes parfois déguisées. C’est ainsi que les habitants du Val-de-Travers, dès les années 1840 au moins, manifestent leur attachement à la Suisse et leur opposition au régime sous une forme déguisée, en organisant le 12 septembre de chaque année la Fête des Fontaines. Cette tradition existe toujours dans les villages de Môtiers et Buttes et elle a été récemment inscrite dans la liste nationale des traditions vivantes.

Inversement, le régime royaliste tenta d’interdire toute célébration du 12 septembre, au point de publier, le 29 août 1836, un « arrêté interdisant certaines manifestations pour l’époque du 12 septembre de chaque année ».

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Source: DAV – Fonds de L’Express

La double appartenance, canton suisse et principauté prussienne, prendra donc fin le 1er mars 1848.

 

Les actes révolutionnaires donnant naissance à la République et Canton de Neuchâtel

Développement historique

Quelques faits ayant amené à ce tournant de l’histoire neuchâteloise:

Un traité de 1707 interdisait au Roi de Prusse d’aliéner Neuchâtel à quiconque. Or, c’est bien ce que fit Frédéric-Guillaume III, le 25 février 1806, cédant ainsi aux pressions de Napoléon Ier, en échange du Hanovre. Commença alors le « Régime Berthier », du nom du maréchal de France, prince de Neuchâtel de 1806 à 1814. Un décret stipula cependant que Neuchâtel conservait son statut de principauté, ce qui fut un soulagement pour les Neuchâtelois qui craignaient d’être purement et simplement intégrés à la France. Ils pouvaient ainsi garder espoir d’un jour devenir canton suisse. D’un point de vue législatif, toutes les alliances et combourgeoisies signées depuis des siècles avec les voisins suisses devenaient caducs (la Principauté en signa plus de 50 entre la fin du XIIIe siècle et la fin du XVIIIe siècle). Mais les vieilles habitudes de voisinage et des liens forts permirent aux Neuchâtelois de conserver les bonnes relations, ne fermant ainsi pas les portes à une future entrée de Neuchâtel dans la Confédération.

Fin du régime Berthier

 Le Régime Berthier prit fin le 26 décembre 1813 avec la fuite du Gouverneur Lespérut et l’arrivée des troupes autrichiennes dans le pays, conséquence de la défaite de Leipzig (octobre 1813) par Napoléon contre les troupes coalisées russes, prussiennes et autrichiennes. Elles franchirent le Rhin le 20 décembre 1813 et pénétrèrent à Neuchâtel trois jours plus tard. 20’000 soldats traversèrent la principauté, entre le 23 décembre 1813 et le 15 janvier 1814 , faisant étape dans les villages neuchâtelois. Ils furent logés, vêtus et nourris par la population locale, et partirent en vidant les caisses de l’Etat… A noter qu’il s’agit là de la seule et unique « occupation » de Neuchâtel par des troupes étrangères.

Retour à la Prusse

 Berthier abdiquera officiellement le 3 juin 1814 et Neuchâtel redeviendra propriété prussienne. Seulement, de plus en plus de Neuchâtelois souhaitaient devenir canton suisse, et le Conseil d’Etat neuchâtelois, avec l’accord de Frédéric-Guillaume III à nouveau souverain, en profitera pour négocier son entrée dans la Confédération. C’est ainsi que le 12 septembre 1814, Neuchâtel devint le 21e canton suisse, tout en restant principauté prussienne jusqu’à l’épisode révolutionnaire de 1848.

 

Point sur les festivités liées au 12 septembre 1814 jusqu’à aujourd’hui

La date du 12 septembre 1814 est passée pratiquement sous silence jusqu’en 1989, année du 175e anniversaire. Plusieurs raisons à cela:

50e anniversaire – 1864

 En 1864 (50e), les Neuchâtelois sont encore trop affectés par les événements contre-révolutionnaires de 1856 pour songer à célébrer les liens avec la Suisse.

100e et 125e anniversaires – 1914 et 1939

 L’année 1914, année du 100e anniversaire, et celle de 1939, année du 125e anniversaire, coïncident avec les Ière et IIe guerres mondiales. Il n’est dès lors pas imaginable de songer à organiser ce type de festivités.

150e anniversaire – 1964

 En 1964, on fait en quelque sorte concorder le 150e anniversaire avec la journée cantonale de l’Exposition nationale. On octroie cependant un crédit pour la publication de l’ouvrage « Neuchâtel et la Suisse » (édité par la Chancellerie d’Etat en 1969 seulement), ainsi que pour la commande d’une cantate. Ces décisions font suite à une prise d’armes politique initiée par un député qui s’indignait à l’idée de fêter une telle date, imparfaite et impure selon lui, estimant que les Neuchâtelois de 1814 à 1848 se sentaient double nationaux et n’avaient pas encore de fait un réel sentiment d’appartenance à la Suisse. Il demande donc de n’en faire qu’un rappel culturel et historique et non un prétexte à des libations populaires. Il est  appuyé par le Grand Conseil et c’est pourquoi il n’y eut pas de manifestation officielle de cet anniversaire.

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Source: archives de l’Etat de Neuchâtel

 

175e anniversaire – 1989

 Il faut donc attendre 1989 et le 175e anniversaire, pour assister à la première commémoration officielle et visible de l’entrée de Neuchâtel dans la Confédération. Le choix de fêter la date du 12 septembre 1814 plutôt que celle de la signature du Pacte en 1815 remonte au pseudo-150e, ainsi qu’aux rares festivités passées, notamment celles de la Fête des Fontaines. Les autorités de 1989 s’y tiendront donc. Le gouvernement a alors souhaité rappeler l’Histoire, les Neuchâtelois étant fiers d’être Suisses. Il s’agissait également de favoriser une réflexion sur la situation actuelle du canton face à la Suisse notamment et, finalement, de scruter l’avenir.

Le président du Conseil d’Etat, Jean Cavadini, profitera de ce podium pour rappeler à la Suisse l’existence de Neuchâtel, estimant le canton quelque peu délaissé par la politique confédérale pas toujours solidaire vis-à-vis d’un petit canton comme Neuchâtel et relevant les points litigieux du moment, notamment la politique routière, les liaisons ferroviaires et les télécommunications.

Les festivités sont voulues sans trop de fastes, mais dignes de l’événement, se déroulant essentiellement le 12 septembre 1989. Les invités officiels des cantons et de la Confédération peuvent ainsi assister à une session extraordinaire du Grand Conseil, puis à un feu d’artifice tiré sur le lac de Neuchâtel à l’intention de la population. Un même feu illumine le ciel des Montagnes neuchâteloises, tiré depuis l’aéroport des Eplatures où se tient une fête organisée conjointement par les Villes de La Chaux-de-Fonds et du Locle.

Le dernier acte a une portée plus politique et nationale. Il consiste à inviter les représentants des Chambres fédérales à un repas dans un restaurant renommé de Berne. Le but est de resserrer les liens confédéraux, tout en se faisant mieux connaître.

Deux objets subsistent du 175e anniversaire de 1814:

  • Une brochure historique, « 12 septembre 1814… et Neuchâtel devint suisse », rédigée par M. Jean-Pierre Jelmini. Elle sera essentiellement destinée aux écoliers du canton.
  • La sculpture « Evasion » d’André Ramseyer, inaugurée le 5 octobre 1990 et sise actuellement encore dans la cour du Château de Neuchâtel. Un film a suivi la création de l’œuvre, montrant le sculpteur au travail. Cette sculpture a été offerte par les cantons suisses.

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Sculpture A. Ramseyer. Source: SP

 

Sources:

  • « 12 septembre 1814… et Neuchâtel devint suisse », Jean-Pierre Jelmini, 1989

  • « Histoire du Pays de Neuchâtel », tome 2, ouvrage collectif, 1991

  • Site internet de « Images du patrimoine », Société d’histoire et d’archéologie du canton de Neuchâtel

  • Archives de l’Etat de Neuchâtel, Fonds du 175e anniversaire, 1989

 
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